Pour répondre à cette question, nous pouvons citer Antoine Lavoisier, philosophe du XVIIIème siècle :
En effet, l’un des objectifs de l’économie circulaire est de créer des flux permettant de réinjecter nos “déchets” dans des boucles afin de les valoriser. Cependant, l’économie circulaire de se réduit pas à la gestion de fin de vie des produits. Ce modèle alternatif propose de multiples solutions performantes et durables par rapport à notre modèle économique linéaire, que nous allons vous présentez ci-dessous.
Avant de vous présenter la notion d’économie circulaire, il faut revenir au concept qui l’oppose : l’économie linéaire, notre modèle économique actuel. L’économie linéaire est l’économie telle que nous la connaissons aujourd’hui et qui prévaut depuis la première révolution industrielle. Elle consiste à « extraire, produire, consommer et jeter ».
Aujourd’hui, ce modèle non durable pour l’environnement et les sociétés humaines a atteint ses limites. La croissance rapide de nos consommations sous ce modèle entraîne l’épuisement des ressources non-renouvelables (énergies fossiles) et des réserves naturelles qui n’ont pas le temps de se renouveler chaque année.
D’autre part, ce modèle économique a modifié l’état de la Terre de manière irréversible. Les scientifiques ont identifié 9 limites planétaires à ne pas dépasser pour éviter le changement d’état du système terre. Depuis 2015, 4 limites ont été dépassées : le changement de la composition chimique de l’atmosphère (autrement dit, le changement climatique), l’érosion de la biodiversité, la perturbation des cycles biogéochimiques du phosphore et de l’azote et le changement d’occupation des sols (notamment à cause de la déforestation)**.
Enfin, la société accumule de plus en plus de matières, limitant leur recyclage. Et lorsque les matières sont jetées, bien que le recyclage soit ancré depuis des décennies dans certaines filières (comme le papier ou l’acier), ce n’est pas suffisant pour faire face à notre sur-consommation. En 2018, un français produisait en moyenne 527 kg de déchets ménagers par an et seulement 44% de ces déchets étaient recyclés (source : Eurostat).
Il devient désormais nécessaire de faire évoluer notre modèle économique et d’entreprendre des actions concrètes, au-delà du recyclage, afin de diminuer l’impact environnemental et social de nos modes de consommation. L’économie circulaire est une solution vers laquelle de plus en plus d’entreprises, de collectivités et de citoyens se tournent pour produire et consommer de façon plus durable.
L’ADEME (l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) définit l’économie circulaire comme :
Par une gestion plus efficace des ressources très largement inspirée des écosystèmes naturels, l’économie circulaire permet notamment de limiter le gaspillage et l’impact environnemental des activités humaines. Elle s’oppose donc à l’économie linéaire, qui ne prend pas en compte ces deux critères.
Les enjeux et intérêts d’une économie circulaire sont multiples, dans tous les domaines d’activité. En agriculture, un des impacts sur le long terme du changement climatique est l’affaiblissement de nos capacités de productions de grandes cultures (maïs, riz, blé etc.). D’ici 2050, une baisse de production du blé est estimée à 42%**. Face à une démographie croissante, il est donc absolument nécessaire de développer des méthodes de production circulaires plus efficaces et plus durables.
En Europe, il existe un parquet européen de l’économie circulaire qui a modifié des directives existantes pour les adapter aux principes de l’économie circulaire, notamment pour la gestion de déchets. Un des objectifs majeurs de l’Union Européenne est de recycler 65% des déchets municipaux d’ici 2030.
En France, le gouvernement se base sur l’ADEME et sur l’approche de cycle de vie d’un produit (de l’éco-conception au recyclage) pour définir l’économie circulaire.
En 2018, la feuille de route de l’économie circulaire a mis en place des mesures réglementaires pour inciter les entreprises à entreprendre des démarches d’économie circulaire. Par exemple, la TVA circulaire permet de réduire les externalités des offres durables et certaines filières (emballage, bâtiment, automobile…) ont l’obligation d’intégrer des matières recyclées dans leurs produits neufs.
En février 2020, la loi anti gaspillage pour une économie circulaire a été promulguée. Les enjeux abordés dans cette loi sont de : sortir du plastique jetable, mieux informer le consommateur, lutter contre le gaspillage et pour le réemploi solidaire, agir contre l’obsolescence programmée et mieux produire.
On peut penser que l’économie circulaire se réduit à la gestion de fin de vie d’un produit. Le modèle va pourtant bien au-delà du simple recyclage. Ce dernier ne représente en effet qu’un seul des 7 piliers qui caractérisent une démarche d’économie circulaire. Ces 7 piliers sont répartis dans 3 grands domaines d’action qui représentent chacun une partie du cycle de vie d’un produit ou d’un service.
Intégrer des démarches d’économie circulaire sur 4 piliers en amont du cycle de vie d’un produit ou d’un service.
L’approvisionnement durable est un approvisionnement qui “concerne le mode d’exploitation/extraction des ressources visant leur exploitation efficace en limitant les rebuts d’exploitation et l’impact sur l’environnement pour les ressources renouvelables et non renouvelables.” *** L’approvisionnement durable repose sur un système où l’exploitation et l’extraction de ressources se pensent en terme de stock disponible et de capacité de renouvellement afin de minimiser l’impact environnemental. Aussi, un approvisionnement durable favorise l’utilisation de matières premières recyclées qui, dans la très grande majorité des cas, possèdent un impact environnemental moindre que l’exploitation de matières premières vierges.
Parmi les initiatives rencontrées par CirculAgronomie et favorisant des approvisionnements durables on peut citer Brussels Beer Project, une brasserie Bruxelloise qui produit de la bière à partir d’invendus de pain. Un second exemple serait EtNISI, une entreprise française qui fabrique divers objets (meubles, carrelage…) à partir de déchets du BTP ou de l’agroalimentaire, comme des briques ou des coquilles de moules.
L’éco-conception est le fait de “concevoir une offre de produits (biens ou services) plus respectueux de l’environnement” ***. Concrètement, il s’agit de considérer l’impact d’un produit sur toute sa durée de vie, depuis l’extraction des ressources nécessaires à sa production jusqu’à sa fin de la vie. L’impact environnemental de chaque étape du cycle de sa vie (transformation industrielle, transport, utilisation) est comptabilisé par l’Analyse de Cycle de Vie (ACV).
L’éco-conception revient donc à réaliser une évaluation systémique de l’impact environnemental dès la conception du produit et de chercher à réduire au maximum cet impact. Avec l’émergence de la Responsabilité Sociétale de l’Entreprise (RSE) et de la demande de transparence des consommateurs sur l’impact des produits, l’éco-conception s’intègre désormais progressivement dans les stratégies de R&D des entreprises.
L’entreprise agro-alimentaire D’Aucy a par exemple mis en place une démarche d’éco-conception pour deux produits de sa marque Cocotine : l’omelette et l’oeuf pasteurisé en bidon. Leur démarche s’est effectuée suite à une enquête satisfaction client afin de comprendre les enjeux importants vis-à-vis de leurs clients. Ils ont réalisé une analyse de cycle de vie de leurs produits en prenant en compte l’alimentation des poules (fabriqué à 20 km de l’usine), les méthodes d’élevage (9 fermes en plein air, Label Rouge et Bio), la transformation des produits ainsi que leurs emballage. Pour chaque étape, les impact environnementaux ont été quantifiés puis des moyens ont été mis en oeuvre pour les diminuer. *
*Exemple pris du MOOC Vers la performance environnementale des produits alimentaires, proposé par AgroParisTech.
C’est “un mode d’organisation inter-entreprises par des échanges de flux ou une mutualisation de besoins, [qui] (…) vise à optimiser les ressources sur un territoire, qu’il s’agisse d’énergies, d’eau, de matières, de déchets mais aussi d’équipements et d’expertises, via une approche systémique qui s’inspire du fonctionnement des écosystèmes naturels.” ***
L’écologie industrielle et territoriale a pour objectifs de :
Tout cela à l’échelle d’un territoire ou d’un écosystème d’entreprises. De manière imagée, c’est une artificialisation de la nature et une naturalisation de l’économie.
Parmi les initiatives rencontrées par CirculAgronomie, on peut citer le SMICVAL (Syndicat Mixte Intercommunal de Collecte et de Valorisation du Libournais Haute-Gironde), une collectivité qui collecte et valorise les déchets ménagers de 138 communes. Les déchets organiques sont par exemple valorisés en compost à destination des viticulteurs de la région.
Ce concept “privilégie l’usage à la possession et tend à vendre des services liés aux produits plutôt que les produits eux-mêmes”. ***
Ceci permet notamment d’augmenter la satisfaction du besoin avec moins de ressources.
L’économie de la fonctionnalité repose sur 6 principes :
Ce type de démarche est difficile à mettre en place car il nécessite un gros changement d’organisation pour une entreprise mais il est économiquement très intéressant sur le long terme pour le fabricant et pour le client.
Un exemple mondialement connu est l’entreprise Michelin qui a mis en place la vente de l’usage des pneus pour les transporteurs routiers. Ceux-ci paye le km parcouru plutôt que le pneu lui-même. Ceci permet une diminution de 50% d’énergie et de matières premières utilisées sur les pneus et baisse les prix tout en augmentant la rentabilité du client.
Intégrer des démarches d’économie circulaire sur 2 piliers en aval de la production, au cours de l’achat et lors de l’utilisation d’un produit ou d’un service.
C’est une consommation qui “doit conduire l’acheteur, qu’il soit acteur économique (privé ou public) ou citoyen consommateur, à effectuer son choix en prenant en compte les impacts environnementaux à toutes les étapes du cycle de vie du produit (biens ou service).” *** La consommation comprend l’acquisition, l’usage et le rejet d’un bien ou d’un service. La consommation responsable répond aux besoins tout en diminuant l’impact écologique et en maintenant la qualité de vie des personnes et de la collectivité. Ceci se fait notamment grâce aux achats responsables, à la consommation collaborative, à la réutilisation, à la prolongation de la durée de vie et à l’autoproduction.
Parmi les initiatives rencontrées par CirculAgronomie, on peut notamment citer Fruta Feia, une entreprise portugaise qui rachète auprès des agriculteurs les fruits et les légumes hors calibres, et donc invendables en moyennes et grandes surfaces. Les produits sont ensuite vendus aux consommateurs sous forme de paniers, ce qui promeut le circuit court et diminue significativement le gaspillage alimentaire.
“L’allongement de la durée d’usage par le consommateur conduit au recours à la réparation, à la vente ou don d’occasion, ou à l’achat d’occasion dans le cadre du réemploi ou de la réutilisation.” ***
Beaucoup de produits aujourd’hui ont une durée de vie plus courte que prévue, pour plusieurs raisons :
Pour contrer ces obsolescences, il existe de plus en plus de démarches innovantes comme les Repair Café, ateliers de réparation collaboratifs qui grâce à l’entraide permettent de réparer de l’électroménager, de l’électronique, ou encore des vêtements.
Intégrer une démarche d’économie circulaire en aval du cycle de vie d’un produit ou d’un service.
Le recyclage est “l’utilisation des matières premières issues de déchets”. ***
En moyenne, les déchets ménagers représentent 10 % des déchets d’un territoire et moins de 40 % de ces déchets sont recyclés. En France, les ménages produisent chaque jour l’équivalent en poids de 10 Tours Eiffel de déchets. En plus de diminuer notre impact environnemental, développer des filières de recyclage est très avantageux car ces filières sont des sources de création d’emplois non-délocalisables très importantes (par rapport à l’incinération) et permettent la coopération entre acteurs (méthanisation à une échelle territoriale, par exemple).
Parmi les initiatives rencontrées par CirculAgronomie, on peut citer Naga Earth, une entreprise sociale basée au Cambodge. Un de ses premiers projets a été de créer du biodiesel à partir d’huiles végétales recyclées issues des huiles de cuisson usagées des restaurateurs de la ville de Siem Reap.
*** définitions de l’ADEME
L’économie circulaire peut être perçue à différents niveaux :
La transition vers une économie circulaire est en marche. Les entreprises, par l’éco-conception, produisent des biens plus durables. Les territoires augmentent leur autonomies en utilisant des ressources renouvelables et en développant des chaînes de valeur locales. Enfin, les citoyens, par leurs implications et leurs engagements, modifient leur mode de consommation pour être plus responsables.
Afin qu’une démarche d’économie circulaire soit un succès, il faut expérimenter, innover, travailler sur le long terme, avoir une vision systémique et favoriser la proximité ainsi que la coopération des acteurs. C’est ce que CirculAgronomie veut promouvoir. Grâce à notre encyclopédie en ligne enrichie d’années en années par nos rencontres de projets à travers le monde, nous souhaitons mettre en avant la diversité des démarches d’économie circulaire et leur succès. Nous voulons démontrer que l’alliance entre durabilité et performance économique est possible.
Les informations avec ** proviennent du MOOC Economie Circulaire et Innovation proposé par l’Université Virtuelle Environnement et Développement durable (UVED) et accessible gratuitement sur fun-mooc.fr.
Voici une courte vidéo réalisée par l’ADEME qui illustre l’économie circulaire et ses piliers :