Web :
Contact :
info@mpact.be
hello@cozywheels.be
bruxelles@cambio.be
Localisation : Toute la Belgique
Date de rencontre : 5 avril 2023
Maturité du projet : Mature
MPact c’est une association qui a été créée en 1975, à l’époque prénommée TaxiStop et dont le concept était de faire de l’autostop avec une rémunération pour le.la chauffeur.euse. Le leitmotiv de l’association a toujours été de faire plus avec moins.
Aujourd’hui, MPact, c’est plusieurs services aux finalités différentes comme CarPool, Mobitwin, Holidaysitting ou encore CozyWheels toujours dans l’optique de plus de partage, moins de ressources utilisées, plus de liens entre citoyen.ne.s, plus de cohésion sociale, plus d’espaces verts et aussi plus d’alternatives de transport.
Nous avons pu échanger avec Simon, salarié de l’association travaillant sur CozyWheels, un service permettant le partage de véhicules privés ainsi que Laurence, utilisatrice du service.
En parallèle de MPact, nous avons rencontré Frédéric, directeur de Cambio Brussels, une entreprise mettant à disposition des véhicules en location sur l’ensemble de la Belgique, et dont le concept est né au sein d’MPact mais qui a évolué en parallèle de l’association
C’est après la Seconde Guerre Mondiale que l’automobile se démocratise dans le monde occidental et que la production explose. Marqueur social, liberté d’aller où l’on rêve sans contraintes, pétrole à faible prix, démultiplication des constructions de routes et d’autoroutes : en 75 ans, la voiture est devenue essentielle au mode de vie occidental.
“Une voiture individuelle reste 95% du temps à l’arrêt, […] on nous montre des publicités avec des voitures roulant dans des rues vides en ville alors que les villes sont très embouteillées”, nous explique Simon. C’est aussi ce que constate Laurence, qui a commencé à utiliser CozyWheels car “99% du temps, notre voiture ne bougeait pas”.
Source image : Le Figaro
Face à ce constat, face à l’envie d’essayer de rentabiliser l’utilisation des voitures et de quitter ce paradigme de la voiture individuelle comme vecteur social, l’idée du partage est née. Partager sa voiture c’est avoir moins de voitures donc diminuer le parc automobile, c’est diminuer les impacts au niveau de la production et c’est récupérer des espaces accaparés par la voiture dans la rue. Mais c’est aussi et surtout un aspect économique, de cohésion sociale et création de liens entre voisin.e.s.
Cambio, c’est une communauté d’utilisateur.ice qui entretient une relation long terme avec une entreprise qui met à disposition une flotte de véhicule adaptée à leur besoin de mobilité. L’idée derrière Cambio est de créer le chaînon manquant en matière d’intermodalité, ainsi elle est toujours connectée au réseau de transports publics afin que l’on puisse prendre le train pour se rendre dans une ville et récupérer la voiture à la gare.
“L’idée est aussi de se rendre compte qu’on est très peu dépendant de la voiture quand on habite en ville.”
Frédéric Van Malleghem, directeur de Cambio Brussels
Un abonnement mensuel à faible coût (à partir de 3 ou 4 €/mois), adaptable selon son utilisation de la voiture et qui permet d’installer une solidarité et de diminuer le coût à l’usage. Une carte carburant est présente dans la voiture, le tarif est donc à l’heure et au nombre de kilomètres parcouru.
Les véhicules choisis sont les modèles faciles à partager pour faire en sorte qu’un véhicule soit adapté pour chaque motif de déplacement.
Les clients de Cambio, dont la moyenne d’âge se situe sur la plage 26-39 ans, utilisent beaucoup les transports publics : 28% utilisent SNCB (réseau de train belge) 1 à 3 fois par mois, 90% utilisent la STIB (réseau de transport en commun Bruxellois) au moins 1 fois par semaine, 26% sont cyclistes quotidiens et 90% habitent à moins d’1 km d’une station.
¼ des client.e.s utilisent des voitures en Flandres ou en Wallonie : iels prennent donc le train jusqu’à ces régions puis enchaînent avec une voiture Cambio à la gare.
Une voiture en remplace 16 personnelles, la facture d’utilisation mensuelle est de 80€/mois les clients utilisent de moins en moins la voiture au fur et à mesure du temps.
CozyWheels c’est un facilitateur de partage : le service met en commun une personne qui a une voiture avec une ou plusieurs personnes en recherche de voiture.
Une voiture est empruntée à 35 centimes/km, ainsi les personnes qui n’ont pas les moyens de se payer une voiture ont quand même accès à ce mode de déplacement à moindre coût.
Profil d’utilisateur.ice.s : personnes jeunes qui ont conscience environnementale et ne veulent pas acheter de voiture.
Profil des propriétaires : personnes plus âgées qui ont deuxième voiture et qui se rendent compte qu’iels n’en ont pas besoin.
Depuis peu, CozyWheels s’est étendu aux entreprises ou coopératives comme UsiToo et aux communes où le partage de véhicule fait totalement sens et où la plateforme de CozyWheels facilite grandement ce dernier. Récemment, iels ont eu la demande d’une commune qui souhaite acheter des vélos cargos et les mettre en partage pour toustes les citoyen.ne.s afin de motiver les citoyens à les utiliser.
Au-delà de l’aspect économique fondamental, CozyWheels est surtout un vecteur de cohésion sociale et de convivialité. Laurence, utilisatrice depuis 2016, a été introduite à ce service via ses nouveaux.elles voisin.e.s lors d’une réunion d’information, voisin.e.s qui sont devenu.e.s utilisateur.ice.s de sa voiture puis ami.e.s. Peu à peu, de plus en plus de personnes de son quartier se sont mis à utiliser sa voiture, “des personnes qu’on avait aperçues dans le quartier sans jamais avoir discuté et on a appris à se connaître”. Avant de se séparer de sa voiture, Laurence et son mari partageaient leur voiture avec 12 autres personnes du quartier.
En plus des aspects économiques et sociaux directs, une réflexion plus profonde et indirecte se pose aussi sur son rapport à la voiture, sur le besoin d’en avoir une, surtout quand on habite en ville.
“Quand une personne commence à utiliser une voiture qui est partagée, elle va diminuer son utilisation de la voiture” nous confirme Simon. Il insiste ainsi sur l’importance d’avoir un bon réseau de transports en commun pour pallier cette diminution car “ce n’est pas parce qu’il y a une diminution de l’utilisation de la voiture qu’il y a une diminution de la mobilité”.
“On change son curseur en fait. Pour moi la voiture c’est plus forcément un plaisir : il y a le stress des bouchons, des accidents. Je préfère largement un voyage en train où je peux rêvasser, lire, faire autre chose sans ce stress.”
Laurence, utilisatrice de CozyWheels et Cambio depuis 2016
Simon nous introduit au principe STOP, créé en 2001 par un ministre belge, Carl Decaluwé, et qui amène à hiérarchiser la mobilité différemment :
Aujourd’hui, quand on regarde cette pyramide, on est plutôt à l’inverse. En effet, “quand on design un carrefour, on pense d’abord à la voiture, puis au bus pour qu’ils ne gênent pas trop les voitures, et si il reste un peu de place on met des pistes cyclables” nous explique Simon, précisant qu’il caricature un peu. Cependant, bien que la mobilité soit actuellement en pleine évolution, cette image n’est pas si caricaturale aujourd’hui.
Il ajoute que la voiture n’est pas non plus totalement à oublier : en effet, “sur certains trajets peu fréquentés il y a plus d’intérêt à avoir une voiture remplie qu’un bus avec 4 personnes dedans.”
Simon insiste sur l’importance de la notion de partage pour la mobilité du futur. Il nous explique que de nombreux.ses chercheur.euse.s travaillant sur les questions de mobilité durable pour un futur viable pensent que le partage est une notion essentielle.
Pour lui, le débat sur la voiture électrique v/s thermique doit avoir lieu mais il ne devrait pas être la base des discussions de la mobilité du futur car “ça reste sur le modèle de base de voiture individuelle privée alors qu’il faut diminuer le parc automobile”.
MPact est également investi dans des projets de recherche, et notamment sur le développement des MobiPoints qui sont des points de mobilité où un.e utilisateur.ice peut passer facilement d’un transport à un autre.
“La mobilité il faut arrêter de la voir comme binaire avec la voiture individuelle mais comme une multitude de possibilités qui s’offre à nous”
Simon Bolle, salarié de MPact travaillant sur CozyWheels
Bien que faisant totalement sens, des réseaux de partage de voiture comme CozyWheels ou Cambio ne fonctionnent que s’il y a suffisamment de personnes sur une zone géographique limitée. La question d’un tel service dans des zones rurales se pose et paraît difficile hors forte volonté d’un noyau de personnes proches ou de communes.
“Ça reste un changement d’état d’esprit, il n’y a pas de solution miracle, sauf la prise de décisions politiques plus importantes.”
Simon Bolle, salarié de MPact travaillant sur CozyWheels
“Politiquement ça ne fait pas vraiment vendre”. Cela se confirme au regard du public qui utilise CozyWheels ou Cambio, souvent des jeunes sensibilisé.e.s aux enjeux environnementaux.
Premièrement car le modèle de la voiture individuelle reste très ancré dans la société actuelle mais également car l’industrie automobile ne travaille pas pour le partage.
Simon prend l’exemple d’un problème très concret du partage de voiture vécu par toustes les utilisateur.ice.s de CozyWheels : les clés. En effet, les voitures ne sont pas conçues pour être partagées, ce qui induit de grosses difficultés pratiques lors du passage de clés. Selon Simon, c’est également sur ces sujets là que l’industrie automobile devrait travailler aujourd’hui.