La Loupiote

Lors de la conception du projet, la construction des installations a été pensée selon le modèle de  » cradle to cradle ». C’est-à-dire que tous les bâtiments sont démontables et la majorité des matériaux sont recyclés/recyclables/remodulables (palettes de coffrage de bétons recyclés pour le sol, vitre des serres en polyéthylène remodulables, bureaux faits à partir d’anciens conteneurs de bateaux…) afin de maîtriser tout le cycle de vie des matériaux, “du berceau au berceau”. 

Les sols de La Loupiote ayant été très appauvris par des cultures de maïs successives avec beaucoup de travail du sol, les engrais verts ne sont pas encore suffisants et le sol requiert encore un apport de MO extérieur. L’objectif de Thibaud est de passer d’une teneur en MO de 2% à 4% sur ses sols.

Le maraîchage sur sol vivant est un mode de culture très technique qui finalement ne repose pas uniquement sur l’apport de matière organique extérieur : la préparation des planches de cultures est certes primordiale, (avec un amendement des sols raisonné sur une période de 10 ans), mais la stimulation de la vie dans le sol l’est tout autant. En effet, le sol est une structure très complexe qui renferme 47% de la biomasse globale [1] sur Terre, la vie du sol est due à un ensemble de mécanismes complexes où chaque organisme a son importance.

Travailler le sol revient à détruire sa structure et donc tuer ces organismes ou empêcher leur action ; c’est donc un modèle de non travail du sol que propose Thibaud pour respecter, développer et enrichir cette vie du sol.

Les macro et micro-organismes du sol permettent la transformation de la matière en éléments nutritifs pour les plantes. Il existe un grand nombre d’acteurs différents (arthropodes, lombrics, nématodes, bactéries, champignons, acariens, protozoaires …) de la transformation de la MO, qui interviennent à différentes étapes : de la décomposition à la minéralisation.

Cependant, les plantes qui prennent racine dans ce sol sont elles aussi très importantes : les interactions entre les racines et le milieu pédologique permettent d’activer la décomposition de la MO. Cette zone d’interactions appelée rhizosphère peut être définie comme une zone d’entraide et de coopération interspécifique : la plante prélève de l’eau et des éléments minéraux dans le milieu mais libèrent également des composés organiques carbonés et azotés pour les autres organismes du sol. On a un phénomène de rhizodéposition qui va permettre la formation des sols et donc dans notre cas, favoriser leur régénération grâce à une vie dans le sol accrue. 

Source : [1] Yinon M. Bar-On, Rob Phillips, and Ron Milo, 19 Juin 2018. The biomass distribution on Earth, PNAS

Pour résumer, la préparation des planches de cultures avec des apports de MO est aussi importante que la présence continue des plantes sur ces planches pour activer la décomposition de la MO et ainsi favoriser l’enrichissement du sol tout en facilitant l’approvisionnement en éléments nutritifs des plantes. L’approvisionnement en MO extérieure se fait par le biais d’acteurs locaux situés dans un périmètre de 30 km environ autour de La Loupiote : la plate-forme de compostage de déchets verts municipaux est localisée à moins de 10 km, des élagueurs entreposent le bois issu de leur activité qui est ensuite broyé, et des agriculteurs se sont organisés pour mettre en commun leur fumier de poules et brebis. Cela permet de valoriser les déchets de ces autres productions.

 Les produits de La Loupiote issus du MSV sont vendus localement : directement aux clients via la vente directe à la ferme ou le marché d’Emmaüs Pau-Lescar, ou bien à des épiceries bio locales.