Web :
fritidsbanken.se
Contact :
Localisation : Suède
Date de rencontre : 12 juin 2023
Maturité du projet : Mature
Fritidsbanken – “banque de loisirs” en français – est une ONG suédoise fondée il y a presque 10 ans qui promeut le développement de bibliothèques d’équipements sportifs dans toute la Suède.
Nous avons eu l’opportunité de rencontrer Henric, le responsable communication de Fritidsbanken Sverige, ainsi qu’Edvin, employé à Fritidsbank Karlstad, l’une des plus grandes bibliothèques d’équipements sportifs du pays.
“Nous avons trois piliers chez Fritidsbanken : tous les objets ont été donnés, tout est gratuit et tout le monde peut emprunter”
Henric, responsable de la communication à Fritidsbanken Sverige
L’histoire de Fritidsbanken, c’est Henric qui peut nous la raconter la plus authentiquement. C’est sa femme, Carina Haak, qui en a eu l’idée il y a 10 ans. Elle trouvait étrange que l’on puisse emprunter des livres dans des bibliothèques municipales mais pas d’équipements sportifs. De plus, étant la diacre de la petite commune de Forshaga, elle était régulièrement en contact avec des mères célibataires ayant des difficultés économiques et ne pouvant pas fournir à leurs enfants les équipements nécessaires à la pratique des sports d’hiver à l’école.
C’est donc à l’automne 2012 que les premiers équipements ont commencé à être collectés dans la commune de Forshaga et la première Fritidsbank a officiellement ouvert en janvier 2013, avec quelque 200 objets. Dix ans plus tard, il existe 127 Fritidsbanken dans tout le pays avec pratiquement 500 000 équipements sportifs disponibles à l’utilisation.
Ces Fritidsbanken locales sont gérées à 90% par des municipalités en ayant fait la demande, les 10% restants par des associations sportives, caritatives ou des ONG. Selon Henric et Edvin, au vu de la demande constamment grandissante, elles seront très probablement toutes gérées par des municipalités d’ici quelques années, ces dernières les inscrivant à l’agenda politique.
“Les employé.e.s qui travaillent ici sont payé.e.s par la municipalité parce qu’il a été décidé que c’était une initiative dans laquelle de l’argent devait être mis”
Edvin – employé à Fritidsbank Karlstad
Toutes les municipalités et associations gérant des Fritidsbanken locales sont ainsi membre de l’ONG Fritidsbanken Sverige qui obtient des financements notamment de la Confédération Nationale des Sports en Suède, l’Association centrale suédoise pour la promotion du sport, la région du Värmland, etc.
En principe, tous les équipements que l’on peut retrouver dans toutes les Fritidsbanken de Suède correspondent à des dons de particuliers, encouragés par l’ONG à s’en séparer s’iels ne les utilisent pas. Parfois des entreprises, des associations sportives et d’autres organisations donnent également.
“Si vous ne l’utilisez pas, quelqu’un d’autre le pourrait.”
Henric, responsable de la communication à Fritidsbanken Sverige
Les dons sont collectés directement dans les Fritidsbanken et dans certaines grandes villes comme à Karlstad, il existe des points de dépôts plus centraux dans la ville afin de permettre à toustes de pouvoir donner sans avoir à se déplacer trop loin. Une fois l’objet donné, il est presque mis immédiatement dans le système informatique s’il est en bon état et qu’il n’y a pas de problème lié à la sécurité.
Pour ouvrir une nouvelle Fritidsbank, il est conseillé d’avoir au moins 1 000 équipements pour avoir une offre complète et également pour donner une sensation “wow”, comme le décrit Edvin, qui donne envie aux gens de se fournir dans de tels lieux. C’est pourquoi les établissements ancrés depuis plus longtemps donnent une partie de leurs équipements aux nouveaux établissements qui peuvent parfois avoir du mal à s’implanter.
Comme le stipule les piliers de Fritidsbanken : tout est gratuit et tout le monde peut emprunter. Edvin explique que les nouveaux visiteur.ice.s sont toujours assez dérouté.e.s quand on leur dit qu’iels n’ont besoin ni d’une adhésion, ni d’une carte d’identité, ni d’une carte bancaire. N’importe qui peut peut venir et emprunter autant d’équipements qu’iel le désire et la seule chose qu’il faut laisser est un nom et un numéro de téléphone ou un email. De cette manière, même des jeunes enfants peuvent venir emprunter seul.e.s en laissant simplement un numéro de téléphone d’un de leurs parents. Après deux semaines d’utilisation, n’importe qui peut venir rendre l’objet, et c’est aussi simple que cela.
“C’est tellement simple que c’en est presque trompeur.”
Edvin – employé à Fritidsbank Karlstad
“Nous faisons confiance et espérons que les personnes prendront ce qui leur plaît ici, qu’elles l’utiliseront comme il se doit et qu’elles reviendront avec ce qu’elles ont pris. Et ça fonctionne dans 99% des cas.”
Henric, responsable de la communication à Fritidsbanken Sverige
Selon eux, cette manière de fonctionner incite les gens à continuer de venir et cela instaure une relation de confiance mutuelle. Henric nous partage le témoignage d’un homme venu de Syrie, immigré en Suède, venu emprunter des équipements et qui était choqué de ne pas avoir à montrer sa carte d’identité. C’était très important pour lui car c’était “la première fois depuis qu’il était arrivé en Suède qu’il n’avait pas besoin de prouver son identité, on lui faisait simplement confiance”.
Il y a de nombreuses raisons écologiques et économiques d’emprunter du matériel dans une Fritidsbank. L’une d’entre elles est de prolonger l’espérance de vie d’objets qui auraient été jetés sinon mais également d’empêcher la production inutile de nouveaux objets.
“Beaucoup de personnes pensent que c’est pour les pauvres, pour ceux qui n’ont pas les moyens d’acheter leurs propres objets. C’est le cas si l’on pense qu’acheter ses propres objets est ce qu’il faut faire. Si vous n’utilisez un objet qu’un seul jour par an, il n’est pas très judicieux de l’acheter et de le stocker pendant 364 jours.”
Henric, responsable de la communication à Fritidsbanken Sverige
Edvin explique que l’objectif des Fritidsbanken n’est pas de prendre les équipements de tout le monde et de les mettre à disposition collectivement. L’idée est de permettre à chacun.e de découvrir différentes activités et d’en aimer tellement une que l’on ressent finalement le besoin d’acheter son propre équipement. “Imaginons qu’une personne veuille essayer le patin à glace, nous avons différentes tailles de patins qu’elle peut utiliser sur plusieurs semaines, puis en emprunter de nouvelles, et peut-être qu’à la fin, acheter sa propre paire est le bon choix pour cette personne car elle adore cette activité” nous explique Edvin. L’idée est de donner une nouvelle vie à ces objets à travers les personnes qui vont les utiliser, et cela garantit que lorsque la personne achètera des patins à glace, ils seront effectivement utilisés car ils ont été utilisés ici d’abord.
Qui plus est, Henric nous raconte que les personnes qui viennent pour la première fois sont très étonnées et se rendent compte qu’il y a ici du matériel souvent de meilleure qualité que ce qu’elles ont à la maison, et en meilleur état.
“Vous vous rendez compte qu’il n’est pas si étrange d’emprunter ce genre de choses, ce ne sont que des objets, mais des objets neufs bien plus chers que des livres, ici gratuits, d’occasion et en bon état.”
Henric, responsable de la communication à Fritidsbanken Sverige
L’un des projets sur lesquels les équipes travaillent actuellement sont des partenariats long-terme avec des écoles. Ces dernières étant des secondes maisons pour les enfants, l’idée serait d’utiliser leur moments de temps libre avec des activités et jeux créatifs grâce à la mise à disposition d’équipements sportifs via Fritidsbanken. Environ 20 écoles partenaires ont pu mettre en place leur propre bibliothèque d’activités avec des objets issus de Fritidsbanken, où ce sont les enfants des écoles qui se relaient pour enregistrer qui emprunte tel objet. Une augmentation des activités ont été notées durant les pauses et c’est également une manière de toucher les parents et professeur.e.s, ainsi que de normaliser dès le plus jeune âge le fait d’emprunter et de partager plutôt que de posséder.
Henric rappelle que le pilier des Fritidsbanken est que tout le monde peut emprunter des objets, et cela inclut les personnes en situation de handicap. Il nous explique que les équipements sportifs adaptés sont à la fois très chers et donc très rares en tant que dons. Néanmoins, l’accessibilité à toustes étant l’une des valeurs principales de l’ONG, les équipes travaillent sur d’autres solutions que le don afin d’avoir accès à de tels équipements comme des partenariats avec des associations sportives possédant ce type de matériel ou l’achat de matériel neuf.
Enfin, nous leur avons demandé s’ils pensaient étendre le concept des Fritidsbanken à d’autres secteurs tels que la musique, les arts créatifs, etc. Selon eux, vu les connaissances que les employé.e.s doivent acquérir dans le domaine des équipements sportifs, il leur paraît compliqué de pouvoir se diversifier et proposer une telle offre et de tels conseils de qualité. Ils nous expliquent cependant que de tels projets ont déjà vu le jour : deux municipalités membres de Fritidsbanken Sverige ont ouvert une banque culturelle où l’on peut emprunter des instruments de musiques, du matériel de peinture ou de théâtre par exemple.